DU CULTE DE L'IMAGE A LA PRISE ILLÉGALE D'INTÉRET : LE PRÉSIDENT DU VAR FACE A LA JUSTICE
- transian citoyen
- 25 août
- 3 min de lecture
L'omniprésence médiatique du président du département du Var, financée par le contribuable, soulevait déjà des questions d'éthique républicaine. Sa récente mise en examen pour prise illégale d'intérêt projette une lumière crue sur ces pratiques et crée, par ricochet, un imbroglio politique qui pourrait bien compliquer la stratégie de défense du Rassemblement National.
Il y a des habitudes qui, à force d'être répétées, finissent par sembler normales. Dans le Var, celle de voir le visage souriant du président du Conseil départemental sur chaque panneau publicitaire, chaque page de magazine vantant une nouvelle route ou un collège rénové, en était une. Une pratique légale, mais éthiquement contestable, qui transformait la communication institutionnelle en une campagne d'auto-promotion permanente, brouillant les lignes entre le service public et le culte de la personnalité.
Nous dénoncions ici même ce glissement, cette conception de la République comme une marque dont l'élu serait l'ambassadeur vedette. L'action publique, rappelions-nous, n'a pas besoin d'un visage pour prouver son efficacité ; elle se juge sur ses résultats. Mais aujourd'hui, l'actualité judiciaire vient donner une toute autre résonance à ce débat.
Quand la justice s'intéresse aux intérêts derrière l'image
Le vernis de la communication institutionnelle s'est fissuré. Le président du Var vient d'être mis en examen pour prise illégale d'intérêt. Si les faits reprochés sont distincts de sa stratégie de communication, ils interrogent sur une même problématique : la confusion entre la fonction publique et les intérêts personnels ou politiques.
La prise illégale d'intérêt, par définition, soupçonne un élu d'avoir profité de sa position pour favoriser ses propres affaires ou celles de ses proches. C'est le passage d'une potentielle dérive éthique – l'usage de l'argent public pour son image – à une suspicion de délit pénal – l'usage de sa fonction pour son intérêt. La frontière, déjà floue sur le plan de la communication, le sera-t-elle aussi sur le plan des intérêts matériels ? L'enquête le déterminera, et la présomption d'innocence demeure.
Toutefois, ce nouveau chapitre judiciaire ternit inévitablement l'image si soigneusement polie à coups de millions d'euros publics. Le visage omniprésent sur les affiches est désormais aussi celui d'un homme face à la justice, renforçant le malaise citoyen face à ce qui apparaît comme une personnalisation excessive du pouvoir.
Un effet collatéral qui paralyse le Rassemblement National
Au-delà du cas personnel du président du Var, cette affaire produit un effet politique secondaire des plus savoureux. Dans ce même département, le maire de Fréjus, figure du Rassemblement National, est lui-même dans l'attente d'une décision de justice en septembre, qui pourrait le mener à une condamnation.
La stratégie de défense habituelle de son parti, en cas de verdict défavorable, est bien connue : crier au complot, à la "justice aux ordres" et au "système" qui chercherait à abattre un adversaire politique. Or, comment tenir ce discours de manière crédible ? Comment dénoncer une justice politique quand celle-ci s'attaque, avec la même rigueur, à un adversaire de premier plan qui n'appartient pas à son camp ?
La mise en examen du président du département vient, de fait, couper l'herbe sous le pied de cette rhétorique victimaire. Elle démontre que la justice enquête sans distinction de chapelle politique, affaiblissant par avance toute tentative de faire passer une éventuelle condamnation pour un procès partisan. L'arroseur se retrouve potentiellement arrosé, non par une manœuvre, mais par le simple jeu d'un calendrier judiciaire impartial.
En fin de compte, cette situation varoise est un puissant rappel à l'ordre. Elle illustre que l'éthique n'est pas une option et que la loi finit toujours par s'intéresser à ceux qui flirtent avec ses limites. Pour les citoyens, c'est la confirmation que la confiance envers les élus se mérite par des actes irréprochables, et non par une omniprésence publicitaire. Pour la classe politique, c'est une leçon : la République est un service, pas un piédestal.
JPC








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