TRANS-EN-PROVENCE, PLACE DE LA VICTOIRE : "QUAND LA ROUTINE TRIOMPHE DE LA VISION"
- transian citoyen
- 31 oct.
- 3 min de lecture
Dernière mise à jour : 2 nov.
Au cœur de la commune, la Place de la Victoire concentre tous les regards. Point névralgique de la vie locale, elle cumule les rôles avec une évidence presque naturelle : stationnement, monument de mémoire, abri-bus, scène de spectacle… autant de fonctions qui s’y entremêlent chaque jour. Autour d’elle, le patrimoine raconte l’histoire : l’église Saint-Victor veille, le Pont Vieux relie les époques, la fontaine et la cascade de la Nartuby murmurent leur fraîcheur au passant.

C’est dire si cette place est bien plus qu’un simple espace public : c’est le cœur battant de la commune, un lieu où tout converge — la mairie, la Poste, la pharmacie de la Cascade, le café de la Gare… Autant de points d’ancrage qui en font un véritable carrefour de vie et de rencontres.
Alors, lorsque les travaux de « rénovation » ont enfin été lancés, l’attente était immense. Les habitants espéraient une métamorphose à la hauteur de leur attachement, un souffle nouveau sur ce symbole du quotidien.
Mais très vite, un constat s’impose, inattendu, presque déroutant : le résultat n’est pas à la hauteur des espoirs.
Un aménagement pratique, mais sans vision

Sur le plan fonctionnel, difficile de nier les avancées : le stationnement est désormais plus rationnel, la circulation mieux organisée, les accès plus clairs. Sur le papier, tout est conforme aux exigences de sécurité et de praticité.

Mais au regard de la richesse patrimoniale du site, le choix des matériaux et du traitement urbain interroge. L’enrobé noir pour la chaussée, les trottoirs en ocre, l’abri-bus standard en verre, le monument aux morts laissé dans son cadre existant… Tout cela donne une impression de projet convenu, sans véritable parti pris esthétique.Le résultat est propre, fonctionnel — mais d’une neutralité déconcertante.
la Victoire manquée d’une place sans âme


Là où l’on espérait un espace fédérateur, la place apparaît comme un simple parking ordinaire, sans identité propre. Dans un environnement si marqué par la pierre, la végétation et les teintes chaudes de Provence, l’usage de matériaux classiques et uniformes produit un contraste saisissant — et pas forcément heureux.
Certains habitants du centre ville regrettent qu’on n’ait pas profité de cette occasion pour penser la place comme un tout, en englobant la route nationale qui la borde dans une même unité visuelle et physique. L’ensemble aurait pu être plat, au même niveau, traité avec des matériaux identiques, dans une logique d’unité et de continuité avec la place de l’Hôtel de Ville, pour créer un vaste espace piétonnisable à la demande, modulable, propice aux animations, marchés ou rassemblements.
Le stationnement aurait pu être délimité par des pavés de teinte différente, la route nationale matérialisée discrètement sans couper l’espace, et la végétalisation repensée pour accompagner la vie du lieu, plutôt que d’en restreindre l’usage.
L’imagination en berne

Plus qu’un simple choix esthétique, c’est une absence de vision d’ensemble que certains déplorent. L’abri-bus standard en verre, par exemple, fait tache dans cet environnement provençal : un mobilier d’inspiration locale, mêlant pierre, bois ou ferronnerie, aurait renforcé l’identité du lieu.
Et contrairement à ce que l’on pourrait croire, ce n’est pas une question d’argent. Vu la surface relativement restreinte, il aurait été tout à fait possible d’imaginer un projet phasé, évolutif, en plusieurs tranches fonctionnelles réparties sur plusieurs exercices budgétaires.

Une démarche progressive, mais ambitieuse, aurait permis d’atteindre un résultat à la fois esthétique, cohérent et porteur de sens. C’est sans doute là que se joue le fond du problème : il faut casser la routine, retrouver l’esprit conquérant et innovant qui animait jadis les élus bâtisseurs. Car le temps use tout — les idées, l’audace, et parfois même la volonté de surprendre.
De même, l’absence de perspective d’évolution — d’espace modulable ou d’équipement culturel léger — laisse penser que le projet a privilégié la conformité à la créativité.
« C’est une rénovation utile, mais sans éclat », résume un habitant, un brin désabusé.
Et maintenant ?
L’aménagement de la place de la Victoire remplit donc sa fonction première : offrir un espace organisé et propre. Mais il n’émeut pas, ne raconte rien, et ne semble pas vouloir devenir ce lieu de vie et de fierté que beaucoup espéraient.

À l’heure où nombre de communes du Var réinventent leurs places en mêlant patrimoine, convivialité et modernité, Trans-en-Provence a sans doute manqué l’occasion de donner à sa place centrale une identité à la hauteur de son histoire.
Peut-être faudra-t-il, un jour, une deuxième phase de réflexion, plus audacieuse et plus sensible, pour redonner à ce cœur de village toute sa vitalité — et ce supplément d’âme que seule une vision cohérente, unifiée et partagée peut offrir.
Jean-Pierre CHRUSZEZ









Il serait intéressant de connaître l avis des ABF qui ont dû être consultés sur cet aménagement...